20 ans après la création du statut Jeune Docteur dans le Crédit d’Impôt Recherche, où en est-on ?
Peut-on vraiment dire que ce dispositif a contribué à favoriser l’embauche des jeunes docteurs dans le secteur privé ?
L’émission Cash Investigations du mardi 19 novembre a remis en lumière le Crédit d’Impôt Recherche (CIR), ce dispositif qui permet aux entreprises innovantes de déduire de leurs impôts, sous certaines conditions, leurs dépenses liées à la recherche et au développement. Sans rentrer dans la polémique de potentiels « cadeaux fiscaux faits aux entreprises » par l’intermédiaire du CIR, nous nous intéressons plutôt ici au statut particulier du Jeune Docteur, mis en place pour favoriser l’embauche des titulaires d’un doctorat dans les équipes de Recherche et Développement (R&D) des sociétés privées.
Apparu en 1999, plusieurs fois remanié et amélioré, en particulier en 2008 lors de la réforme du CIR, le Dispositif Jeune Docteur a pour objectif d’inciter les entreprises à recruter un Jeune Docteur pour leurs activités de R&D.
Comment ça marche ?
Concrètement, depuis 2008, une entreprise dont le taux de CIR est de 30% peut bénéficier pendant deux ans d’un financement allant jusqu’à 120% du salaire chargé d’un Jeune Docteur à compter de son recrutement.
Quels résultats ?
A première vue, on se réjouira de constater que, depuis 2007, le nombre d’entreprises qui recourent au Dispositif Jeune Docteur a quadruplé, passant de 439 en 2007 à 1890 en 2015 (1). Un autre effet positif de ce dispositif serait que les Docteurs accèdent plus rapidement après leur diplôme à un emploi stable en R&D.
La réalité est toutefois un peu plus nuancée. Les résultats de l’étude de Giret et al. (2) -sur laquelle se base ce rapport- montrent également que, sur la période analysée, ce sont en fait surtout les docteurs de spécialité « ingénieurs » et les docteurs également titulaires d’un diplôme d’ingénieur qui ont amélioré leur rapidité d’accès aux emplois de R & D.
De plus, cet effet de raccourcissement de la durée d’accès à l’emploi est essentiellement visible dans les trois premières années qui suivent l’obtention du diplôme. « Il s’amenuise très fortement par la suite ». On peut donc dire que, trois ans après la thèse, le CIR n’a dans l’ensemble pas conduit à augmenter sensiblement la proportion des docteurs qui obtiennent un premier emploi en CDI dans la R & D.
Des résultats mitigés qui montrent le chemin restant à parcourir pour arriver à une réelle prise en compte par les entreprises du secteur privé de la plus-value des Jeunes Docteurs dans le développement de leurs activités liées à l’innovation.
(1) D’après le rapport de mars 2019, « L’impact du CIR » établi par la Commission d’Evaluation Nationale des Politiques d’Innovation pour France Stratégie
(2) Étude de Jean-François Giret (responsable scientifique), Bernela B., Bonnal L., Bonnard C. et Calmand J. (2018)